Tempête et calme
L'ombre
Suit
Sombre
Nuit ;
Une
Lune
Brune
Luit.
Tranquille
L'air pur
Distille
L'azur ;
Le sage
Engage
Voyage
Bien sûr !
L'atmosphère
De la fleur
Régénère
La senteur,
S'incorpore,
Evapore
Pour l'aurore
Son odeur.
Parfois la brise
Des verts ormeaux
Passe et se brise
Aux doux rameaux ;
Au fond de l'âme
Qui le réclame
C'est un dictame
Pour tous les maux !
Un point se déclare
Loin de la maison,
Devient une barre ;
C'est une cloison ;
Longue, noire,
prompte,
Plus rien ne la
dompte,
Elle grandit, monte,
Couvre l'horizon.
L'obscurité s'avance
Et double sa
noirceur ;
Sa funeste apparence
Prend et saisit le
coeur !
Et tremblant il
présage
Que ce sombre nuage
Renferme un gros
orage
Dans son énorme
horreur.
Au ciel, il n'est
plus d'étoiles
Le nuage couvre tout
De ses glaciales
voiles ;
Il est là, seul et
debout.
Le vent le pousse,
l'excite,
Son immensité
s'irrite ;
A voir son flanc qui
s'agite,
On comprend qu'il
est à bout !
Il se replie et
s'amoncelle,
Resserre ses vastes
haillons ;
Contient à peine
l'étincelle
Qui l'ouvre de ses
aquilons ;
Le nuage enfin se
dilate,
S'entrouvre, se
déchire, éclate,
Comme d'une teinte
écarlate
Les flots de ses
noirs tourbillons.
L'éclair jaillit ;
lumière éblouissante
Qui vous aveugle et
vous brûle les yeux,
Ne s'éteint pas, la
sifflante tourmente
Le fait briller,
étinceler bien mieux ;
Il vole ; en sa
course muette et vive
L'horrible vent le
conduit et l'avive ;
L'éclair prompt,
dans sa marche fugitive
Par ses zigzags unit
la terre aux cieux.
La foudre part
soudain ; elle tempête, tonne
Et l'air est tout
rempli de ses longs roulements ;
Dans le fond des
échos, l'immense bruit bourdonne,
Entoure, presse tout
de ses cassants craquements.
Elle triple
d'efforts ; l'éclair comme la bombe,
Se jette et rebondit
sur le toit qui succombe,
Et le tonnerre
éclate, et se répète, et tombe,
Prolonge jusqu'aux
cieux ses épouvantements.
Un peu plus loin,
mais frémissant encore
Dans le ciel noir
l'orage se poursuit,
Et de ses feux
assombrit et colore
L'obscurité de la
sifflante nuit.
Puis par instants
des Aquilons la houle
S'apaise un peu, le
tonnerre s'écoule,
Et puis se tait, et
dans le lointain roule
Comme un écho son
roulement qui fuit ;
L'éclair aussi
devient plus rare
De loin en loin
montre ses feux
Ce n'est plus
l'affreuse bagarre
Où les vents
combattaient entre eux ;
Portant ailleurs sa
sombre tête,
L'horreur, l'éclat
de la tempête
De plus en plus
tarde, s'arrête,
Fuit enfin ses
bruyants jeux.
Au ciel le dernier
nuage
Est balayé par le
vent ;
D'horizon ce grand
orage
A changé bien
promptement ;
On ne voit au loin
dans l'ombre
Qu'une épaisseur
large, sombre,
Qui s'enfuit, et
noircit, ombre
Tout dans son
déplacement.
La nature est
tranquille,
A perdu sa frayeur ;
Elle est douce et
docile
Et se refait le
coeur ;
Si le tonnerre
gronde
Et de sa voix
profonde
Là-bas trouble le
monde,
Ici l'on n'a plus
peur.
Dans le ciel
l'étoile
D'un éclat plus pur
Brille et se dévoile
Au sein de l'azur ;
La nuit dans la
trêve,
Qui reprend et rêve,
Et qui se relève,
N'a plus rien
d'obscur.
La fraîche haleine
Du doux zéphir
Qui se promène
Comme un soupir,
A la sourdine,
La feuille incline,
La pateline,
Et fait plaisir.
La nature
Est encor
Bien plus pure,
Et s'endort ;
Dans l'ivresse
La maîtresse,
Ainsi presse
Un lit d'or.
Toute aise,
La fleur
S'apaise ;
Son coeur
Tranquille
Distille
L'utile
Odeur.
Elle
Fuit,
Belle
Nuit ;
Une
Lune
Brune
Luit.
Jules VERNE
Jules VERNE
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